Les Palestiniens sont victimes d’une
injustice inacceptable...
Pierre
Jourde
Pierre
Jourde est romancier (“Paradis noir” sortira chez Gallimard en février),
essayiste (“Littérature monstre” vient de paraître) critique littéraire (“La
littérature sans estomac”) et professeur à l’université de Grenoble III, du
moins tant que quelque chose comme l’université existe...
J’ai reçu ce texte par mail, sans plus de détails. Je ne sais donc pas où il a été publié la première fois.
Les Palestiniens sont victimes d’une injustice
inacceptable.
Au
nombre de morts, de réfugiés, d’horreurs, il y a beaucoup mieux, un peu
partout. Remarquons, à titre d’apéritif, qu’avec la meilleure volonté du monde,
Tsahal aura du mal à exterminer autant de Palestiniens que l’ont fait, sans
états d’âmes, les régimes arabes de la région, notamment la Syrie, le Liban et
la Jordanie, qui n’en veulent pas, eux non plus, des Palestiniens, et qui ont
peu de scrupules humanitaires lorsqu’il s’agit de s’en débarrasser.
Mais
Israël est un coupable idéal, non seulement dans nos banlieues, mais en Europe
en général.
Nous
le chargeons de toute notre mauvaise conscience d’anciens colonisateurs. Une
poignée de Juifs qui transforme un désert en pays prospère et démocratique, au
milieu d’un océan de dictatures arabes sanglantes, de misère, d’islamisme et de
corruption, voilà un scandale. Il faut donc bien que cela soit intrinsèquement
coupable, sinon où serait la justice ? L’injustice est avant tout israélienne.
Ce n’est même pas un fait, c’est une métaphysique.
Cent
chrétiens lynchés au Pakistan valent moins, médiatiquement parlant, qu’un mort
palestinien.
Pourquoi
l’injustice commise envers les Palestiniens reçoit-elle vingt fois plus d’écho
que celle faite aux Tibétains, aux Tamouls, aux chrétiens du Soudan, aux
Indiens du Guatemala, aux Touaregs du Niger, aux Noirs de Mauritanie ? Y a-t-il
plus de gens concernés, plus de sang versé, une culture plus menacée dans son
existence ? En fait, ce serait plutôt l’inverse. Que la Papouasie soit envahie
par des colons musulmans qui massacrent les Papous et trouvent, en plus,
inacceptable de voir les rescapés manger du cochon, voilà qui ne risque pas de
remporter un franc succès à Mantes la Jolie.
Que
des “sales Nègres”, considérés et nommés comme tels, soient exterminés par des
milices arabes au Darfour, les femmes enceintes éventrées, les bébés massacrés,
voilà qui ne soulève pas la colère des jeunes des cités. Et c’est dommage.
Si
l’on accorde des circonstances atténuantes à un jeune Français d’origine
maghrébine qui s’en prend à un Juif à cause de la Palestine, alors il serait
tout aussi logique de trouver excellent que tous les Maliens, Sénégalais ou
Ivoiriens d’origine s’en prennent aux Algériens et aux Tunisiens. Voilà qui
mettrait vraiment de l’ambiance dans nos banlieues.
Le
Racisme franchement assumé des Saoudiens ou des Emiratis envers les Noirs, les
Indiens ou les Philippins, traités comme des esclaves, ne soulève pas la
vindicte de la tribu Ka, ni des Noirs de France.
La
responsabilité directe des Africains dans la traite des Noirs n’induit pas des
pogroms de guinéens par les Antillais.
Pourquoi
seulement Israël ? A moins que la haine d’Israël ne soit que le paravent du bon
vieil antisémitisme; mais non, cela n’est pas possible, bien entendu.
Israël,
20.000 km2, 7 millions d’habitants, dont 5 millions de Juifs, est responsable du
malheur des Arabes, de tous les Arabes, qu’ils soient égyptiens, saoudiens ou
français.
Israël
est l’Injustice même. En le rayant de la face du globe, en massacrant les
Juifs, on effacerait l’injustice.
C’est
bon, de se sentir animé par une juste colère. C’est bon, d’éprouver la joie de
frapper et de persécuter pour une juste cause.
Voilà
pourquoi il ne faut pas dire aux “jeunes des cités” que les deux millions d’Arabes
israéliens ont le droit de vote, élisent leurs députés librement. Ne leur dites
pas qu’Israël soutient financièrement la Palestine. Ne leur dites pas que des
milliers de Palestiniens vont se faire soigner dans les hôpitaux israéliens.
Ne
leur dites pas que l’université hébraïque de Jérusalem est pleine de jeunes
musulmanes voilées. Ne leur demandez pas où sont passés les milliers de Juifs d’Alexandrie.
Il en reste trente aujourd’hui. Ne leur demandez ce qu’il est advenu de tous
les Juifs des pays arabes.
Ne
leur demandez pas s’ils ont le droit au retour, eux aussi.
Ne
leur demandez pas quelle est la société la plus “métissée”, Israël ou la Syrie.
Ne leur dites pas que, s’il y a de nombreux pro-palestiniens en Israël, on
attend toujours de voir les pro-israéliens dans les pays arabes.
Ne
leur dites pas que le négationnisme ou l’admiration pour Hitler ne sont pas
rares dans les pays arabes; que, lorsqu’il s’est agi d’illustrer les
différentes cultures par leurs grands textes, la bibliothèque d’Alexandrie a
choisi d’exposer, pour le judaïsme, le Protocole des Sages de Sion; que ce faux
antisémite est largement diffusé dans les pays arabes.
Ne
leur dites pas que, du point de vue des libertés, de la démocratie et des
droits de l’homme, non seulement il vaut mille fois mieux être arabe en Israël
que Juif dans un pays arabe, mais sans doute même vaut-il mieux être arabe en
Israël qu’arabe dans un pays arabe.
Ne
leur dites pas qu’Alain Soral, du Front national, qu’ils détestent tant, est
allé manifester son soutien au Hezbollah, qu’ils admirent si fort.
Si
on leur enlève la méchanceté d’Israël, que deviendront ceux d’entre eux qui s’en
prennent aux feujs, sinon des brutes incultes, bêtement, traditionnellement
antisémites ?
Il
ne faut pas désespérer Montfermeil.
Mais
après tout, on peut tout de même essayer de leur dire tout cela sans trop de
risque. Ils traiteront l’informateur de menteur, d’agent du Mossad, de
représentant du lobby sioniste ou de raciste.
Ils
auront raison. Pourquoi se défaire de la commode figure du Croquemitaine
responsable de toute la misère du monde ? Elle évite de s’interroger sur ses
propres insuffisances...
Pierre Jourde
UN PEU DE BON SENS MORAL
Par Aaron
Moss
Les commentaires ajoutés entre parenthèses sont de Luc Henrist.
Question :
Je suis le seul Juif à mon bureau, et j’essuie un barrage
quotidien de questions au sujet des actions d’Israël à Gaza. Je ne sais pas qui
m’a nommé porte-parole d’Israël et je ne détiens pas les réponses. Pouvez-vous
m’aider ?
Réponse :
En des temps comme celui-ci, chacun d’entre nous
devient un ambassadeur d’Israël. Même si vous n’êtes pas d’accord avec tout ce
que fait Israël, toute personne décente doit défendre le droit d’Israël de se
défendre.
Nous pouvons laisser les questions militaires et politiques aux
experts, mais nous devons être clairs quant aux questions morales soulevées par
cette guerre. Considérons quelques-unes des questions les plus communément
posées.
Q : Comment Israël peut-il justifier de tuer des civils si leur
intention est seulement d’écraser le Hamas ?
R : La mort des innocents est
une tragique fatalité de la guerre. Notre cœur est avec tous ceux qui sont pris
entre deux feux. La triste réalité est que le peuple palestinien est tenu en
otage par le Hamas. De même qu’il est clair que le Hamas est moralement
responsable de tout ce qui arrive à Guila Shalit, l’otage israélien qu’ils
détiennent, il est également responsable du sort des innocents palestiniens
parmi lesquels ils se cachent pour lancer leurs roquettes. Un civil qui est tué
alors qu’il était utilisé comme bouclier humain par un terroriste est une
victime du terroriste, pas de l’armée israélienne, qui ne vise pas de civils
innocents.
Q : La réponse d’Israël n’est-elle pas quelque peu
disproportionnée ?
R : Si l’objet d’Israël était de se venger, alors
peut-être la question de « proportion » pourrait s’appliquer ici. Mais Israël
mène une guerre de défense. Quand vous êtes en guerre, vous ne mesurez pas votre
réponse à l’ennemi par rapport à ce qu’il vous a fait par le passé, mais en
fonction de ce qui doit être fait pour l’empêcher de vous attaquer. Israël doit
détruire la capacité du Hamas à lancer des missiles sur les villes israéliennes.
Les actions d’Israël sont proportionnées aux menaces présentes et futures, non
aux dommages causés par le passé.
(Et j’ajoute : Si Israël devait répondre
d’une façon “proportionnée”, il faudrait alors acheter des obus artisanaux sur
une brocante et en envoyer 10.000 sur Gaza, car c’est le nombre d’obus qui ont
été tirés contre Sdérot pendant ces sept dernières années à partir de
Gaza...)
Q : Israël ne comprend-il pas qu’ils sont en train de fabriquer
plus de terroristes ? La colère et la fureur contre Israël déclenchées par
l’opération contre Gaza auront pour effet que plus de gens voudront rejoindre
les rangs du Hamas.
R: Les sentiments de frustration, de colère, de peur et
de rage ne font pas de vous un terroriste. Une culture de la mort et une
éducation à la haine le font. Israël n’a pas besoin faire quoi que ce soit pour
créer des terroristes – l’islamisme extrémiste s’en charge. Cependant, Israël
doit agir pour neutraliser ceux qui menacent ses habitants.
(Et j’ajoute ce
que j’ai lu sur “Le Soir” en ligne hier : “il n’y a pas de montée de
l’antisémitisme dans la communauté musulmane de Belgique, il a toujours été
là...”)
Q : Il est vrai que le Hamas a une branche militaire, mais il fait
aussi beaucoup de bien. Ils ont des programmes sociaux, des projets éducatifs et
accomplissent un travail humanitaire à Gaza. En détruisant le Hamas, Israël
détruit aussi le bien qu’il fait. N’est-on pas en train de diaboliser un groupe
qui n’est pas totalement mauvais ?
R : S’il se trouve qu’un tueur en série
est aussi sapeur pompier volontaire, qu’il a donné beaucoup d’argent à un
orphelinat et qu’il veille sur sa grand-mère malade, il n’en reste pas moins un
tueur en série, et lui et la menace qu’il représente doivent être traités comme
tels. Le danger qu’il constitue l’emporte largement sur le souci du bien qu’il
peut accomplir.
Q : En usant de violence, en quoi Israël est-il meilleur
que ses ennemis terroristes ?
R : Ceci est aussi ridicule que de dire qu’une
femme qui se défend contre un violeur n’est pas meilleure que le violeur. Israël
ne toucherait pas au Hamas si le Hamas arrêtait de lancer des missiles et des
terroristes kamikazes en Israël. Israël cherche à vivre en paix avec ses
voisins. Le Hamas et ses alliés cherchent à détruire Israël, quoi qu’Israël
puisse faire.
Il y a un monde de différence entre les terroristes du
Hamas et les soldats israéliens. Le terroriste du Hamas fait de la violence son
mode de vie. Son but est de semer la mort et la guerre. Pour le soldat
israélien, la guerre est une nécessité, et un devoir moral, parce que les
citoyens israéliens sont attaqués et que des vies innocentes sont menacées. Le
terroriste du Hamas cherche à faire un maximum de victimes civiles. Le soldat
israélien cherche à faire tout ce qui est en son pouvoir pour en faire le moins
possible.
Le terroriste du Hamas craint les périodes de paix, parce
qu’alors il n’a pas de raison d’être. Le soldat israélien rêve d’un temps ou la
paix régnera. Alors, l’Armée de Défense d’Israël sera heureusement superflue,
car “une nation ne lèvera plus l’épée contre une autre nation, et on
n’apprendra plus l’art de la guerre”.