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Psaume 137

Crier ses frustrations

Au bord des fleuves de Babylone, nous nous étions assis et nous pleurions en pensant à Sion.

Aux saules de leurs rives, nous avions suspendu nos harpes.

Ceux qui nous avaient déportés, nous demandaient des chants, nos oppresseurs voulaient des airs joyeux : “Chantez-nous, disaient-ils, quelque chant de Sion !”

Comment peut-on chanter les chants de l’Eternel sur un sol étranger ?

Si jamais je t’oublie, Jérusalem, que ma main droite perde sa force !

Oui, que ma langue se colle à mon palais si je ne pense plus à toi, Jérusalem, si je ne te mets plus avant toute autre joie.

Souviens-toi, Eternel, des Edomites qui en ce jour du malheur de Jérusalem, criaient bien fort : “Rasez-la donc, rasez-la jusqu’aux fondations !”

O Babylone, tu seras dévastée ! Heureux qui te rendra ce que tu nous as fait !

Heureux qui saisira tes nourrissons pour les briser contre le roc !

Psaume 137 (SEM)

Ce psaume nous fait subir de plein fouet le choc des prières de malédiction.Il s’agit d’une série de prières d’imprécation. Le psalmiste demande que Dieu maudisse ses ennemis dans des termes parfois insupportables. Les plus connues de ces demandes affreuses se trouvent dans les psaumes 35.1-6; 69.23-29; 104.35; 109.7-15; 139.19-24.

Sont-ils les survivances d’une religion primitive qu’il faut supprimer de la Bible ? C’est une solution de facilité inacceptable. Faut-il prendre exemple dessus à l’exemple des terroristes d’aujourd’hui ? La Bible nous le défend explicitement dans l’enseignement du Christ. Comment faut-il les comprendre ?

Pas de solutions simplistes !

Ces textes ne seraient-ils pas inspirés ? Ce serait trop simple ! Une fois qu’on accepte ce genre de méthode, on finira par enlever de la Bible tout ce qui nous porte ombrage. 2Tim 3.16 nous rappelle que toute l’Ecriture est inspirée de Dieu et utile pour enseigner.

C’est l’Ancien Testament, ils ne savaient pas mieux ! Mais est-ce le cas ? Voici quelques textes de ce même Ancien Testament concernant nos ennemis : Ex 23.4,5 (Si tu rencontres le bœuf de ton ennemi ou son âne égaré, tu ne manqueras pas de les lui ramener. Lorsque tu verras l’âne de celui qui te déteste succomber sous sa charge, et que tu n’auras pas envie d’aider cet homme, aide-le quand même à délester son âne); Lév 19.17,18 (Tu ne haïras pas ton frère dans ton cœur, mais tu ne manqueras pas de reprendre ton prochain pour ne pas te charger d’un péché à son égard. Tu ne te vengeras pas et tu ne garderas pas de rancune envers les membres de ton peuple, mais tu aimeras ton prochain comme toi-même. Je suis l’Eternel.); Pr 24.17 (Ne te réjouis pas lorsque ton ennemi tombe, ne saute pas de joie lorsqu’il succombe sous le malheur. Le Seigneur verrait cela d’un mauvais œil et il détournerait sa colère de ton ennemi). Non, ils pouvaient et devaient savoir mieux. D’ailleurs, en le disant, ne nous condamnons pas nous-mêmes ? Faisons-nous vraiment mieux ?

Dieu ne ferait de mal à une mouche ! C’est archi faux ! C’est du Bouddhisme. Et encore, même les Bouddhistes n’agissent pas ainsi là où ils sont au pouvoir ! Si nous croyons cela, voulons-nous dire qu’il n’y a pas de distinction entre le Bien et le Mal ? Que faire le bien ou le mal, c’est la même chose du point de vue de Dieu et qu’il pardonnera aux injustes sans que ceux-ci aient à se repentir ? Et le Déluge alors, ou l’Apocalypse ?

Dieu et ses ennemis

Il y a une vraie lutte entre le Bien et le Mal, la croix en est la preuve. La Mal sera puni. Dieu est rigoureusement juste et cela devrait faire trembler ses ennemis. Il n’y aura aucun passe-droit. Mais Dieu préfère changer ses ennemis en amis, Act 2.36,37 nous rappelle comment il invite ceux qui sont coupables de la crucifixion de son Fils bien-aimé de se repentir afin de recevoir son pardon. Et si on refuse ? Si on préfère vivre orgueilleusement sa vie sans Dieu ? Des textes comme Act 12.22,23 (Le peuple s’écria : C’est un dieu qui parle et non pas un homme ! Mais, au même moment, un ange du Seigneur frappa Hérode, parce qu’il s’était réservé l’honneur dû à Dieu : il fut rongé par les vers et mourut); 13.8-11 (Mais le magicien Elymas—tel est son nom en grec—s’opposait à eux et cherchait à détourner de la foi le gouverneur. Alors Saul, appelé aussi Paul, rempli du Saint-Esprit, fixa son regard sur lui et dit : Homme plein de ruse et de méchanceté, fils du diable, ennemi de tout ce qui est bien ! Ne cesseras-tu jamais de vouloir fausser les plans du Seigneur ? Maintenant, écoute : le Seigneur va te frapper, tu seras aveugle et tu ne verras plus la lumière du soleil pendant un certain temps. Aussitôt, les yeux d’Elymas s’obscurcirent et il se trouva dans la nuit : il se tournait de tous côtés, cherchant quelqu’un pour le conduire par la main) nous disent quelque chose de la colère de Dieu qui nous menace tout autant.

Comment devons-nous traiter nos ennemis ? Nous ne devons pas rendre les insultes, 1P 2.23; 3.9. Nous devons bénir, et non maudire, Rom 12.14,21. Nous devons aimer nos ennemis, Luc 6.27,28. David, un des psalmistes, agit ainsi avec Saül, son ennemi. David sait aussi (et nous devrions le savoir) que la vengeance appartient à Dieu (Dt 32.35 = Rom 12.19). La malédiction viendra en son temps, comme le rappelle Jésus en Mt 25.41, et comme le décrivent des textes comme Ap 18.20; 19.1-3.

Le cri des victimes

D’où viennent alors ses expressions choquantes ? Le but de ces psaumes est de nous faire entendre le cri des victimes, de ceux qui n’ont pas accès aux redressements et qui souffrent sous l’oppression. Nous ne sommes pas ici devant des gens dans la tranquilité de leur bureau, en train de construire leur aversion des ennemis. Voici leur situation : O mon Dieu, sauve-moi, j’ai de l’eau jusqu’au cou. Dans la boue, je m’enlise, sans point d’appui. Me voici descendu au plus profond des eaux; le torrent me submerge. Je m’épuise à crier, mon gosier est brûlant, mes yeux se sont usés à t’attendre, mon Dieu. Car ceux qui me haïssent sans la moindre raison ont dépassé le nombre des cheveux de ma tête. Ils sont puissants, ces ennemis menteurs : ils veulent me détruire, me haïssant sans cause. Je dois restituer ce que je n’ai pas pris. … Leurs outrages m’atteignent, ils m’ont brisé le cœur, je ne m’en remets pas; j’espère un geste de sympathie en ma faveur, mais mon attente est vaine, quelqu’un qui me console, mais je n’en trouve pas. Ils ont mis du poison dans le pain que je mange. Pour étancher ma soif, ils m’offrent du vinaigre. (Ps 69.2-5,21,22) Et dans un de ces psaumes imprécatoires, David décrit sa situation ainsi : Mon Dieu, lève-toi pour me rendre justice; Seigneur, réveille-toi pour défendre ma cause. Tu es juste, Seigneur, rends-moi donc justice; mon Dieu, qu’on cesse de s’amuser de moi ! (Ps 35.23,24) Ils veulent que les torts soient redressés. Que ceux qui ont le pouvoir ne puissent pas s’acheter leur propre justice. Ils savent que Dieu se lèvera pour rendre cette justice, Ps 76.9,10. Jésus lui-même nous encourage à le penser, Luc 18.7. On ne crie pas en vain. Dieu entend, et Dieu interviendra.

Que faire de nos émotions ?

Ces Psaumes nous disent ce que nous pouvons faire avec ces émotions troublantes de haine et de colère. Nous pouvons les exposer à Dieu, l’appeler au secours (137.7), accepter son regard (cf. 139.23,24 !), laisser passer la tempête émotionnelle sans dommages, exprimer sa confiance en la justice de Dieu, Ap 6.10. Après tout, mieux vaut dire à Dieu ces choses horribles qui bouillonnent dans un coeur souffrant que de les dire aux hommes ! Nous ne sommes pas des saints aseptisés, inaccessibles à la colère. La prière elle-même peut déclencher en nous des paroles peu louables. Mais Dieu sait entendre nos émotions et agir en profondeur en nous pour que nous puissions agir comme il le désire, malgré notre souffrance.

Peut-être même que le fait de nous exprimer ainsi honnêtement devant lui peut aussi préparer un travail plus profond en nous, comme le dit ce même David en Ps 143.2 : N’entre pas en procès avec ton serviteur ! Aucun vivant n’est juste devant toi. Dieu désire que nous puissions arriver à la croix où l’ennemi que nous étions a été pardonné.

Il n’y a que deux réponses au mal : la croix et la damnation.
En fait, n’est-ce pas la même réponse ?

 

A suivre


Il n’est pas fou celui qui perd ce qu’il ne peut garder, afin de gagner ce qu’il ne peut perdre. (Jim Elliot)